Associer la communication gestuelle à la parole en crèche

L’enfant pleure, crie mais comment le comprendre lorsqu’il n’a pas encore développé le langage verbal ? A-t-il faim ? Est-il douloureux ? A-t-il besoin d’un contact physique avec l’adulte ? A-t-il sommeil ?

Nous pouvons nous retrouver dans une impasse et frustré de ne pas pouvoir comprendre et répondre pleinement aux besoins de l’enfant. La communication gestuelle associée à la parole offre aux tout-petits la possibilité d’être acteur de l’échange avec l’adulte tout en étant compris dans ses besoins.

Mais comment pratiquer cette communication et l’intégrer dans notre pratique professionnelle au quotidien en impliquant tous les acteurs d’une structure : les enfants, les parents et les professionnels ?

L’origine de la communication gestuelle associée à la parole

La communication gestuelle associée à la parole ou aussi appelée en France « bébé signe » naît dans les années 80 aux États-Unis. En effet, Joseph Garcia, un étudiant américain constate que les enfants entendants ayant des parents sourds développaient le langage verbal plus rapidement que les enfants entendants ayant des parents entendants. Il constate également que ses enfants signent tôt.

De plus, à cette même période, Lina Acredolo et Susan Goodwyn, spécialistes en développement de l’enfant, mènent une étude sur ce phénomène. En effet, elles observent que les enfants qui ne parlent pas encore utilisent spontanément des gestes pour s’exprimer et communiquer avec les autres. C’est en 1996, que leur livre « Baby signs : How to talk with your baby before your baby can talk ? » paraît.

Mais qu’est-ce que c’est ?

La communication gestuelle associée à la parole peut être défini comme un ensemble de gestes simples qui sont associés à un mot. C’est parler à l’enfant en accompagnant certains mots de la phrase par des signes. Par exemple, dans la phrase « Tu retrouves maman ce soir », l’adulte va signer le mot « maman ». Signer ne retarde donc pas l’acquisition de la parole car le signe est toujours associé à la parole.

Ces mots sont le plus généralement des mots courant que l’on utilise au quotidien avec le tout petit : « manger », « dormir », « papa », « jouer », « fatigué » …

Certains signes sont les mêmes que ceux utilisés dans la langue des signes française.

Et le positionnement de l’adulte ?

La communication gestuelle associée à la parole invite et oblige l’adulte à s’ajuster à l’enfant, à se mettre à son niveau et à venir vers lui pour communiquer. En effet, l’enfant à besoin d’être face à vous pour qu’il puisse voir le signe associé à vos paroles.

Cette communication vient remettre en question nos pratiques professionnelles afin de s’ajuster au plus près des besoins de l’enfant et d’assurer un accueil bienveillant ainsi qu’une qualité relationnelle bienveillante et bientraitante.

La communication gestuelle associée à la parole est un outil dont l’enfant peut se saisir ou non. Il pourra s’en saisir plus tardivement lorsqu’il en aura envie et/ou besoin. Cela ne vous empêche en rien de continuer à signer bien au contraire.

A quoi ça sert ?

- Mieux satisfaire les besoins des tout petits par une meilleure compréhension

- Réduire les frustrations et pleurs liés à l’incompréhension

- Développer les liens d’attachement

- Créer des liens de complicité avec l’entourage (parents, professionnels, frères/sœurs)

- Renforcer l’estime de soi et la confiance en soi de l’enfant

- Développer et renforcer sa motricité fine

- Encourager l’acquisition de la parole

- S’inscrire dans une démarche de soutien à la parentalité

- Assurer une communication bienveillante et respectueuse pour communiquer avec les enfants mais aussi entre adulte

A partir de quel âge peut-on signer avec un enfant ?

Dès la naissance, pour s’habituer à signer. En effet, durant les premiers mois de vie de l’enfant sa coordination de l’activité gestuelle n’est pas tout à fait maitrisée. En effet, les actions et gestes sont encore involontaires. Il faut donc laisser le temps à l’enfant d’assimiler les mots associés aux signes qu’il pourra pratiquer dès l’instant où sa praxie sera davantage développée et maîtrisée. Ainsi, l’enfant peut commencer à signer entre ses 6-9 mois, lorsque ses compétences lui permettent, alors que langage verbal, lui, n’apparaît que vers 2 ans.

Comment mettre la communication gestuelle associée à la parole en pratique au sein d’une structure petite enfance ?

Le plus important est d’en échanger en équipe. En effet, certains professionnels sont déjà très à l’aise avec cette pratique tandis que d’autres peuvent ne pas du tout la connaître.

Il est alors fondamental de pouvoir en échanger en équipe lors de réunions dédiées à ce sujet :

- Définition du projet

- Intérêts pour l’enfant, les parents et l’équipe de la structure

- En quoi cela s’inscrit dans le projet de la structure ?

- Comment vous sentez-vous à l’aise avec un tel projet ? De quoi avez-vous besoin pour le réaliser et le mettre en place ?

Un tel projet demande plusieurs réunions d’échanges afin qu’il soit construit et en accord avec tous. Il doit pouvoir s’inscrire dans le projet pédagogique de la structure. Il est alors intéressant de travailler avec divers partenaires comme le psychologue et le médecin de la structure pour penser et réfléchir la communication gestuelle associée à la parole auprès des enfants.

Une fois que le projet est construit et prêt à être mis en place, il me semble primordial de pouvoir en informer les parents à travers des cafés des parents et/ou un livret qui explique brièvement l’intérêt du projet et les signes qui seront pratiqués quotidiennement dans la structure. Cela peut permettre également une continuité entre le domicile de l’enfant et la structure dans laquelle il est accueilli.

Il est important de pouvoir rassurer les parents car certains peuvent avoir des craintes et représentation : « Mais cela va retarder l’acquisition du langage ! » « Il parle déjà est-ce que ça sert à quelque chose ? ».

Une journée pédagogique pour former toute l’équipe à cette communication peut venir consolider le projet et permettre de travailler ses pratiques professionnelles.

Enfin, pour permettre aux professionnels d’actualiser leurs pratiques professionnelles et de revoir régulièrement les signes, des réunions flash de 20-30 minutes peuvent être mis en place selon un planning et un roulement défini au préalable. Ceci est l’occasion de revoir des signes et d’apprendre de nouvelles chansons signées par exemple. 

BIBLIOGRAPHIE

Enfants :

- Livre « Petites histoires et comptines à signer »,  Nathanaëlle Bouhier-Charles & Coline citron, éditions Nathan

- Livres « Mes premiers signes : Je t’aime ! », « Mes premiers signes : Bravo ! », éditions Piccolia

- Livres « Tidou – C’est l’heure de manger », « Tidou – C’est l’heure de se coucher », Lyla signes & Hyacinthe Gioanni, éditions Hatier Jeunesse

Parents et professionnelles :

- Applications mobiles « Bébé signe » & « Élix »

- Livre « Encore ! Jouer, chanter et ... signer, Bébé adore ça », Isabelle Thomas & Monica Companys, éditions monica companys

- Livre « Signe avec moi », Nathanaëlle Bouhier-Charles & Monica Companys, éditions monica companys

- Livre « Le grand guide des signes avec bébé », Marie Cao, éditions Marabout

Lalie Marty Benaïssa, @eje.vibes

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