Accompagner le Sommeil des Enfants : 5 croyances courantes à repenser pour agir mieux
Le sommeil est l'un des sujets les plus sensibles en périnatalité, mêlant croyances, mythes populaires et recommandations variées. Pour les professionnels de la petite enfance, il est essentiel d'adopter une approche réfléchie, à la fois pour comprendre les besoins physiologiques des enfants et pour mieux soutenir les parents. Cet article démystifie quelques croyances courantes afin d'offrir un accompagnement optimal pour les familles et les jeunes enfants.
1. "Les professionnels et les parents doivent endormir l’enfant"
L’idée selon laquelle il revient aux adultes « d'endormir » les bébés est une idée reçue largement partagée. Pourtant, l’endormissement est un processus autonome. Les parents et les professionnels ont pour rôle de créer un environnement propice au sommeil, mais le bébé est capable de s’endormir seul dès ses premières semaines de vie. Cela inclut la période in utero, où l’enfant commence déjà à expérimenter des rythmes de sommeil.
Adopter une posture de « gardien du sommeil » signifie offrir un cadre sécurisant, des repères et des rituels réguliers qui permettent au bébé de s’endormir naturellement. Il est important de favoriser un environnement calme, rassurant et prévisible.
Astuce pratique : Plutôt que de dire qu’on a « endormi » un bébé, on dira qu’il « s’est endormi ». Cette distinction contribue à une posture respectueuse de l’autonomie du tout-petit et évite de lui attribuer une posture passive.
2. "Il ne faut pas laisser un bébé pleurer"
Il est important de nuancer cette idée : il ne faut pas laisser un bébé pleurer SEUL. La distinction est essentielle. Le jeune bébé ne sait pas réguler ses émotions et a besoin du soutien d'un adulte. L’accompagnement d’un adulte confiant et disponible, tant sur le plan physique que psychique, est primordial pour que l’enfant puisse se calmer et se rassurer.
Entre 4 et 6 mois, les comportements d'auto-apaisement sont encore peu développés et peu efficaces. C’est à cet âge que l’adulte joue un rôle clé dans la régulation des émotions du bébé. Toutefois, à partir de 12 à 18 mois, le cortex préfrontal commence à se développer, permettant à l’enfant de gérer un peu mieux ses émotions. À ce stade, les rituels d’auto-apaisement se diversifient et chouiner /pleurer un peu en font partie.
De plus, certains enfants ont plus besoin de pleurer que d’autres, en pleurant ils vont pouvoir diminuer leur taux de cortisol (l’hormone du stress) et accéder à un sommeil de meilleure qualité. Ce qui compte, c’est qu’ils ne soient pas laissés seuls dans l’angoisse.
3. "Accompagner un enfant qui s’endort au sein est impossible"
On entend souvent que les enfants qui s’endorment au sein ne sauront pas s’endormir autrement. Pourtant, un bébé habitué à s’endormir au sein peut tout à fait adopter de nouvelles routines de sommeil en crèche, pourvu que l’environnement soit sécurisant. Toutefois, si un enfant présente des tensions physiques apaisées par une succion au sein régulière, il peut être plus difficile pour lui d’accéder au sommeil et judicieux de conseiller aux parents de consulter un spécialiste en tensions oro-maxillo-faciales.
Voici quelques signes de tensions à surveiller :
-Agitation et difficulté à se calmer : Le bébé paraît nerveux ou irritable.
-Bouche irritée ou cloquée : Des signes souvent liés à une succion inefficace.
-Mouvements de tête brusques : Des gestes saccadés peuvent signaler des tensions musculaires.
-Pleurs fréquents sans cause apparente : Indice d'un inconfort physique.
-Difficultés à s’endormir : L’enfant semble avoir du mal à trouver une position apaisante.
En crèche, la constance des rituels et un accompagnement bienveillant aident à sécuriser l'enfant. Des routines comme raconter une histoire ou chanter une berceuse l’aident à anticiper sereinement le sommeil.
4. "Porter un enfant trop souvent le rendra dépendant"
C’est une croyance répandue mais inexacte. Au contraire, porter un enfant le rassure et renforce sa sécurité affective. Le portage permet au bébé de développer une base émotionnelle solide, essentielle à son autonomie future. En crèche, le portage peut apaiser les bébés qui recherchent davantage de proximité. Plutôt qu’un signe de dépendance, il s’agit d’un geste de soutien et de sécurité affective qui permettra ensuite à bébé d’être un explorateur libre et confiant.
5. "Il ne faut jamais réveiller un enfant qui dort, ni arrêter la sieste avant l’entrée à l’école"
Il est souvent affirmé qu’il ne faut jamais réveiller un enfant qui dort, mais ce n’est pas une règle absolue. Tout dépend de l’âge de l’enfant et de son contexte de sommeil. Par exemple, un enfant de 2 ans qui dort trop longtemps en journée peut avoir des difficultés à s'endormir le soir, perturbant ainsi son rythme nocturne.
Dans de tels cas, il peut être nécessaire de réveiller l’enfant en douceur pour préserver un équilibre de sommeil optimal. Chaque situation est unique et nécessite une évaluation attentive des besoins de l’enfant, en concertation avec les parents. Il est essentiel de comprendre que le sommeil diurne et nocturne sont interdépendants et doivent être régulés en fonction des besoins individuels.
Conclusion : Si certaines situations justifient de réveiller un enfant, la communication avec les parents est clé pour ajuster les pratiques et trouver la meilleure solution pour le bien-être de l’enfant, le respect de la vie en collectivité et l’équilibre familial.
Conclusion : De la Théorie à la Pratique
Le sommeil du jeune enfant reste un sujet complexe, mais en déconstruisant ces croyances erronées, nous pouvons améliorer notre approche et offrir un accompagnement plus serein aux enfants et à leurs parents. En tant que professionnels de la petite enfance, il est fondamental d’adopter une posture réflexive, de remettre en question nos pratiques et de nous tenir informés des dernières avancées en matière de développement infantile et de sommeil.
Travailler avec les parents, comprendre leurs préoccupations et partager des observations en crèche permet de mieux répondre aux besoins de chaque enfant. En fin de compte, c’est le respect des rythmes individuels et une approche bienveillante qui permettront de créer un environnement propice à un sommeil réparateur et à un développement harmonieux.
À propos de l’auteure
Charlotte Pouyet est formatrice petite enfance, spécialisée en communication interpersonnelle, thérapeute parentale et spécialiste du sommeil du jeune enfant. Retrouvez toutes ses formations sur charlottepouyet-formation.fr.
Ces articles pourraient également vous intéresser
L’utilisation des bruits blancs pour endormir les bébés est-elle vraiment sans danger ?
Associer la communication gestuelle à la parole en crèche
83 vues totales, 83 aujourd'hui